Légendes et histoire
La Légende de Saint-Privat
Autour d'un fait historique, autour d'un personnage réel une légende est née...
Les actes de cet être ont été amplifiés son champ d'actions a été déformé à tel point qu'il est presque impossible d'en reconnaître le bien-fondé et le déroulement chronologique; l'imagination populaire a déformé, telle une loupe, le véritable cours de l'histoire ; et celle-ci est une chose, la légende qui s'appuie sur elle une toute autre chose.
Cette pénétration est particulièrement intense dans ce qu' il est convenu d'appeler les légendes hagiographiques, qui chantent la vie et le martyre ou la mort des saints de notre primi tive église du Gévaudan. Là, pendant trois siècles aumoins l'histoire confine à la légende car la tradition orale fut seule à conserver vivante la mémoire du premier évêque de Gévaudan, Saint Privat.
L'histoire. - Saint Privat vivait, selon la majeure partie des érudits locaux, au IIIe siècle. Il subit le martyre à la fin de ce siècle lors de l'invasion des Alamans aux ordres de Chrocus à Mende et sur son tombeau s'éleva une église. Sa sépulture et l'endroit où il se retirait pour prier devinrent des lieux de pèlerinage.
La légende. - Les Barbares le découvrirent en prières et n'ayant pu obtenir du héros chrétien qu'il sacrifiât à leurs idoles, ils l'arrachèrent à la croix qu'il avait embrassée, et l'attachant dans un tonneau garni de fers tranchants, l'abandonnèrent à la pente du rocher. Le tonneau roula en bondissant et alla s'arrêter dans les ronces qui bordaient pied de la montagne.
Au pied du rocher de l'ermitage de Saint-Privat, il yavait une fontaine d'huile d'olive de première qualité. Elle était exclusivement réservée pour les gens pauvres qui dans temps-là ne se faisaient faute ni de salades ni de fritures. Mais voilà que les riches s'avisèrent de vouloir faire leur cuisine aux dépens de la canaille, c'est-à-dire d'aller puiser de l'huile à la fontaine et dès lors la source se tarit et ne donna plus rien à personne.
La Légende et Sainte-Enimie
L'histoire.
De sang royal, Enimie,sœur du roi Dagobert, atteinte par la lèpre vint en Gévaudan, sur ordre de Dieu, pour être guérie. Après être allée aux bains renommés de Bagnols, en vain, elle est conduite à Burle et guérie. Elle veut repartir, mais la lèpre la reprend. Guérie par un nouveau bain elle repart. Désespérée par une nouvelle atteinte du mal elle retourne à la source miraculeuse, est guérie, fonde un monastère, et meurt dans la prière et le recueillement. Autour de son tombeau, s'éleva le bourg de Sainte-Enimie.
La Légende.
Un troubadour du XIIIme siècle, Bertran de Marseille, a chanté, en langue provençale, les miracles et la vie de Sainte Enimie. La légende essaie d'associer la vie de la Sainte aux accidents naturels du pays, à ses monuments et à ses noms de lieux
... Quand elle eut ainsi réfléchi et qu'on eut un peu plus avancé, le mal l'a reprise une autre fois, et l'a toute brûlée. Là encore en cet endroit, où elle fut toute brûlée par le mal, il y a deux villages dont l'un s'appelle Branède à cause de cette brûlure. Là même sur la route où elle se mit à réfléchir est un autre village qu'on nomme Pessade, car là elle réfléchit. Denhas, Branède et Pessade sont trois villages sur la route, dans un parcours de demie-lieu ; quiconque y passe peut le savoir, Pessade est entre les deux villages de Branède et de Denhas".
Le Drac
Nous sommes en plein merveilleux, et la croyance au Drac, Dracounet est très répandue.
Esprit malin, rusé, ennemi de l'humanité, il s'apparente dans bien des circonstances à Gripet, le Diable...
Le Drac au Pas-de-Souci
Sainte Enimie s'était établie à Burle dans une région jusque-là païenne. Drac ou Satan en était fort contrarié et, souvent, se servant des avens dont est parsemé le Causse pour sortir de l'Enfer, il venait persécuter les nonnes du monastère fondé par la Sainte.
Enimie, comprenant d'où venait le désordre, obtint de Dieu le pouvoir d'enchaîner Ie démon s'il s'introduisait au couvent. Surpris un jour, Drac s'échappa pourtant et se mit à fuir le long du Tarn. La sainte se lança à sa poursuite à travers ces affreux rochers. Elle fut longue et fatiguante cette course.
Au cirque des Baumes, Saint Ilère était dans sa grotte en prière, le diable se fit petit en passant sous cette retraite et le saint était plongé dans une telle oraison qu'il ne vit rien. Haletante et épuisée, Enimie s'arrêta. Le démon lui échappait, car il touchait au gouffre du Tarn et allait y plonger pour gagner de là ses enfers. Elle s 'écria : "A mon secours, montagne arrête-le ". Tous les énormes rochers s'élancent alors sur l'ennemi. Très fort et très leste, le démon subit sans s'arrêter l'avalanche des menus rocs. Son pied touchait déjà le bord du gouffre quand l'effroyable masse de la Sourde lui tomba dessus. La roche Aiguille, gênée dans sa descente par sa grande taille, était encore à mi-montagne : "As.tu besoin de moi, ma sœur, cria--t-elle à la Sourde?" "C'est inutile, je le tiens bien ! ".
La sainte vit le diable pris ; elle fit un geste et tous ces rocs s'arrêtèrent dans le moment, gardant leur position. Drac put se dégager et regagner son ténébreux royaume malgré le poids énorme de la Sourde. Dans sa rage impuissante, il griffa la base du rocher et depuis lors - jusqu'à une inondation de 1875 - sa main sanglante est restée empreinte sur la pierre.